Pas besoin d'etre un grand anthropologue pour imaginer que le type de vie de chacun menait devait forcément avoir une influence pas seulement sur leur physique, mais aussi sur leurs perceptions, leurs aptitudes, leurs comportements, leurs gouts, leurs préférences...

   C'est ainsi que leur cerveau a peu à peu évolué en fonction de leur mission. Des dizaines de milliers d'années à refaire chaque jour les memes choses, ça vous forge le tempérament pour l'éternité.

   Résultat: plus tard, beaucoup plus tard, que nous le voulions ou non, nous héritons, homme ou femme, du cerveau assorti à notre état. Nous recevons à la naissance, génétiquement, les talents, les compétences, mais aussi les limites et les faiblesses de notre sexe.

   Bref, nous sommes dépositaires de leurs différences. Des différences qui n'ont, semble-t-il, rien à voir avec un quelconque conditionnement social, mais avec le cours normal de l'évolution de l'espèce. Selon les plus sérieux observateurs, meme isolés du reste du monde, les filles et les garçons continueraient à etre ce qu'ils sont, et à faire ce qu'ils font. Et ce n'est pas en habillant une fille en bleu et un garçon en rose qu'on empecherait la première d'aimer jouer à la poupée et le second de préférer le ballon.

   Il y a une petite vingtaine d'années, un manuel de pédiatrie qui cherchait à rassurer les parents assurait qu'il n'y avait aucune "normalité" de comportement. Le médecin expliquait: "Tel petit garçon escaladera sans cesse chaises et escabeaux, tandis que telle petite fille restera bien sage à lire un livre." En plein avènement du féminisme, c'était, meme involontairement, de la pure provocation.

   Et c'est très loin de ce que les scientifiques cherchent à établir aujourd'hui: pour eux, ce serait plutot que "telle petite fille", si elle se met à escalader un escabeau, va avant tout regarder là où elle pose les pieds ; tandis que "tel petit garçon" aura plutot tendance à foncer en se précipitant vers le sommet avec impatience. Aucun sexisme. Aucun anti-féminisme. Des faits.

   Des faits longtemps méconnus: pour observer le cerveau, les médecins n'ont eu jusqu'au milieu du 20eme siècle que la dissection à leur disposition. Il parait qu'ils travaillaient essentiellement sur les soldats morts, et l'armée comptait peu de femmes. On a donc du se contenter de conclusions établies de façon non pas partiale, mais partielle. Et comme hommes et femmes font partie de la meme espèce, ces médecins n'ont pas cru faire preuve de mauvaise foi en extrapolant aux femmes ce qu'ils avaient appris grace à des cerveaux masculins. Et quand ils avaient la chance de tomber sur un cerveau féminin, ils le pesaient et en concluaient que, pesant moins lourd que celui de l'homme, la femme devait probablement etre moins intelligente. Plutot stupide, non? Surtout que maintenant, avec scanner, IRM et autres moyens d'investigations aussi pointus à l'appui, on peut légitimement soutenir le contraire. Des preuves?

   Il a fallu attendre les années 60 pour affirmer avec certitude que les deux hémisphères du cerveau sont liés à des fonctions différentes. L'hémisphère gauche est en charge de la pensée rationnelle: la logique, la raison, la déduction, l'analyse, le langage. L'hémisphère droit est le lieu de la pensée émotionnelle: l'information visuelle, la perception par les sens, l'intuition, l'imagination, la créativité. Il se trouve que l'hémisphère gauche est plus développé chez l'homme, alors que les deux sont strictement identiques chez la femme. Et que, contrairement à l'homme, la femme peut mobiliser ses deux hémisphères en meme temps.

   Une histoire drole pas très drole circulait dans les années 60: après un accrochage en voiture, un gendarme interroge le responsable, un homme: "Comment ça s'est passé?" L'homme répond: "Monsieur l'agent, je vous assure, je n'y suis pour rien. Tout est de la faute de la femme dans la voiture devant moi... - Mais pourtant c'est vous qui avez embouti sa voiture, réplique l'agent. - Oui mais, vous comprenez, elle avait mis son clignotant à gauche. - Et alors? reprend l'agent. - Elle a vraiment tourné à gauche, Monsieur l'agent vous vous rendez compte? Comment j'aurais pu m'en douter, moi..."

   La femme a beaucoup de mal à distinguer sa droite de sa gauche. C'est de notoriété publique. Et c'est réellement le cas semble-t-il pour une femme sur deux. Qui, lorsque vous lui demandez de tourner à droite, semble soudain traversée d'une onde de panique.

   C'est du à la configuration de son cerveau, dont les deux hémisphères peuvent etre mobilisés simultanément. L'homme qui les utilise, lui , alternativement, n'a aucune difficulté à tourner à droite quand on le lui demande. Mais de toute façon, il connait très bien le chemin.